Attracteurs étranges
Attracteurs étranges est un projet évolutif de la peintre plasticienne Elisabeth Bard et de la comédienne et performeuse Boryana Todorova. Le projet est une exploration du temps – le temps qui passe, son mouvement, le fait-même de son écoulement, sa perpétuelle et implacable absence au fond. Le présent n’existe pas – le temps nécessaire pour conscientiser ce que nos sens perçoivent même s’il ne dure quelques microsecondes, ne permet pas une connexion immédiate à ce qui nous entoure. Notre vie consciente se déroule dans un flot de perceptions que notre esprit tisse ensemble pour faire sens. Ce flot d’un vide très plein est ‘l’attracteur étrange’ qui nous a rassemblées dans le désir de créer une œuvre commune.
Attracteurs étranges est un projet-pari. Nous parions sur la rencontre et la fécondation de nos deux recherches respectives. Nous faisons le choix du déplacement, déplacement de nos pratiques et de nos lieux d'expression.
Elisabeth Bard, se confronte à la mémoire, la mémoire incarnée dans des photos argentiques, héritage commun et insaisissable des traces de nos présences. Elle décide d’en découdre… en les cousant ensemble. Mais de l’importance de l’image à celle même du tissage, du fil, de l’aiguille, la création à l’oeuvre répercute les échos symboliques et s’ouvre vers ce qu’elle n’imaginait pas. Boryana Todorova, se saisit d’un matériau éphémère - la glace, l’eau gelée. L’exploration est donc celle du temps, mais aussi celle de la trace. En laissant fondre des masques glacées sur des feuilles de papier, et en y laissant tomber quelques gouttes d’encre, elle obtient des silhouettes de visages improbables, hasardeux, fantomatiques, révélateurs de l’interaction entre les matériaux. L’exploration est aussi celle de l’accumulation, accumulation de ces « portraits », et accumulation de masques fondant et formant une étendue d’eau.
Hasard relatif, actions autonomes des matériaux, gestes initiateurs, et ouverture vers ce qui advient. Quelque chose est dans la forme.
- Les attracteurs étranges sont des objets mathématiques qui "révèlent la discrète structure qui se dissimule dans un flot de données incohérent" La théorie du chaos, James Gleick -
Les images présentées sont celles d'une première étape de travail qui a eu lieu au cours d'une résidence au MAGA, à Bruxelles en Juin 2018.
Dans une nouvelle étape de travail à venir, nous projetons de nous rencontrer dans l’action-même de nos corps dans une performance commune. Nous réunirons nos matériaux - papier, papier-photo, encre, glace ; et nos corps dans la pratique de leurs arts - la danse et la peinture. Le corps en mouvement et le geste du peintre rentreront en résonance avec la surface glacée, rugueuse, fondante.